Nos amis les hommes. 20/10/2014

Alors que je posais négligemment mon arrière train à la terrasse du Flore comme le firent avant moi quelques célébrités littéraires de la rive gauche, j’eus à ce moment-là envie de prendre la plume pour parler de cet été indien qui bouleverse en profondeur le niveau de nos météorologues autant que celui de nos océans qui s’habituaient jusque là à se faire polluer mollement par quelques chimiquiers peu regardant sur la qualité de leurs cargos lituaniens. Je me faisais cette réflexion majeure alors que je regardais fondre mon glaçon en imaginant la banquise venir mourir gentiment aux portes de l’église Saint-Germain, emportant enfin le touriste chinois et l’orchestre de jazz dans une vague magistrale et glacée. Je ne sais pas ce qui était le plus indécent ce jour là, les 30 degrés ambiants ou le prix farfelu de ce Spritz, cette boisson amère qui fit la renommée des soirées vénitiennes avant de devenir le snobisme orangé des apéritifs germanopratins, et que je sirotai à la paille en me félicitant que Marc Lévy reçoive enfin le Prix Chantal Nobel de littérature pour son œuvre du niveau de Châteauvallon. Ici parmi les littéreux gisaient quelques vieillards millionnaires venus profiter du réchauffement climatique en renversant leur chocolat chaud sur leurs gilets de cachemire, un teckel immonde comme unique héritier couché sur leurs Weston. Leur petit cercle continuait encore à s’agrandir (des millionnaires, pas des vieillards), devant même doubler d’ici 2019 pour le plus grand bonheur des banquiers suisses et des constructeurs allemands.
Quant au passant mesquin qui réfute à se payer un café à 4, 50 euros à cette même terrasse, comment peut-il seulement comprendre le quotidien morne et dangereux de cette minorité galopante ? Comment peut-il une minute se demander ce qui pousse Mark Zuckerberg et Facebook à racheter What’s App pour 22 milliards d’euros alors qu’il n’y a toujours pas l’électricité dans la plupart des foyers africains ? Tout juste peut-il constater qu’il y a de plus en plus de publicités pour des banques alors qu’il y a de moins en moins d’argent sur son Livret A, seulement rassuré en voyant que son pécule est en sureté chez Gad Elmaleh. Et si en plus il s’avère que la Française des Jeux se met à truquer l’Euromillions, c’est tout l’équilibre et les rêves d’avenir de Maison Phoenix qui partent en fumée.
Dans le Nord, où la proportion de milliardaires reste bizarrement moins élevée qu’à Monaco, voilà que des clowns terrorisent les écoles et les bambins qui n’avaient pas besoin de tout ce cirque dans une région plus que touchée par les faits divers sordides ! Comme dans un mauvais film d’horreur (Stephen King, Dany Boon), faut-il seulement s’inquiéter de cette blague potache (regardez plutôt American Horror Story 4 !) ou de ce nouveau phénomène urbain alors qu’il agite l’Assemblée Nationale depuis des années ?
Et puisque vous me forcez à parler politique, sachez que je ne suis pas un ardent défenseur de la lapidation, ça fait mal aux bras ! Mais peut-on trouver meilleure solution pour faire enfin taire Nadine Morano ? De ces peuplades dont elle aboie l’ignominie à longueur de meeting, elle apprendra peut-être les bienfaits d’une méthode qui a fait ses preuves dans des contrées où il n’y avait historiquement ni aspirateur, ni TF1 pour calmer les femmes oisives et par trop revendicatives lorsque leurs maris rentraient d’une longue journée harassante à ne rien faire. Et que le premier qui n’a jamais eu quelques pensées taquines pour se défouler après le boulot me jette la première pierre !
J’étais d’ailleurs en train d’imaginer comment faire basculer discrètement ce musicien de rue par dessus le Pont de Notre-Dame, lorsque sur le trottoir d’en face, un guitariste discret chantait « Wayfaring Stranger » d’une voix tremblante et inattendue au milieu des touristes incultes. Une des chansons les plus belles et les plus tristes du folk, de la Terre, un trésor si pur qu’aucun aspirant chanteur ne la salira jamais sur un plateau de télé-crochet. Un de ces instants de grâce inattendu qui redonne foi en l’humanité, nous fait retomber amoureux de cette fille à qui l’on aurait du faire écouter ce morceau avant qu’elle ne s’échappe, qui donne envie de boire des Spritz dans un troquet picard et de faire le clown pour effrayer les vieux à la terrasse du Flore. Un moment suspendu beau comme une photo d’Afrique de Sebastiao Salgado, un silence vivifiant dans cette jungle urbaine. Je n’ai à peine eu le temps d’esquisser un sourire, que les connards normaux klaxonnaient au feu rouge.

Nos amis les hommes. 8/10/2014

En ce dimanche normal où des pilotes s’écrasent sous la pluie nippone contre des pelleteuses aux yeux de l’abonné Canal +, je sortais revigoré de ma dentiste, joviale quinquagénaire du 16e, à l’hygiène et au confort buccal irréprochables, qui a la bonne idée d’être ouverte le dimanche, et pas qu’un peu. Après le petit jet parfumé pour se rincer la bouche qui clôture toujours en beauté nos rencontres orthodontales, je me retrouvais bien malgré moi pris au piège de ces hordes braillantes de sauvageons en pull mohair qui inculquent à leurs enfants blonds comment piétiner avant l’heure les libertés d’autrui votées par ailleurs par quelques représentants légaux de ce pays. La plupart de ces charmants bambins n’étant pas encore passée dans un confessionnal , il est sûr que leur orientation sexuelle n’est toujours pas clairement définie et l’on espère bon nombre de jolies surprises à venir chez les François-Xavier Dupont-Lajoie. Mais qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu pour mériter ça ? Et lui que fait-il pour éviter tout ça ? Ebola ? Al Qaida ? Le typhon Odile ? Des volcans qui pètent ? On sent bien que le cœur n’y est plus… Au Japon d’ailleurs, où l’on a le sens de la pudeur et la peur des gros mots, on ne meurt pas : on est en état d’arrêt cardiaque. Mais l’on range quand même les promeneurs imprudents du volcan Ontake dans de jolis sacs noirs.
On accueillerait d’ailleurs bien volontiers les lauréats japonais du Prix Nobel de physique qui bossaient sur les ampoules LED, non pas pour empeser les débats de Touche Pas à Mon Poste, non chacun à droit à son moment de détente, mais bien plutôt pour remettre un peu de lumière dans un pays qui s’éteint peu à peu. Et quand les Le Pen la mette en veilleuse, c’est Zemmour qui électrise les foules grâce à son pavé littéraire moyenâgeux jeté dans la mare de la démocratie progressiste sous les hourras de la foule en délire qui n’en peut plus de tous ces indigènes venus prendre le salaire de nos footballeurs blancs. La révolution est en marche, arrière. A droite, on s’agite, on regarde Sarkozy dans son meilleur rôle, celui de pleureuse sous ecsta venue nous faire le coup du sauveur malgré lui, alors qu’il a d’autres chats à fouetter et bien mieux rémunérés. Mais ni Bygmalion (d’autres sont en garde à vue à sa place), ni l’argent piqué à ses adhérents, ni Bruno Le Maire, ni Juppé le Père, ni la dette colossale laissée en héritage ne sauront se mettre en travers de sa croisade personnelle ! La misère sera quoi qu’il arrive plus tranquille au soleil de l’Elysée qu’à l’ombre de la Santé.
Ce qui nous donne en plus la chance de voir souvent Christian Estrosi, cette bonne bouille amie des vedettes et qui intervient pour défendre les têtes connues : Nico, à qui il en rend 2 sur les photos, Hervé Gourdel à qui on a pris la sienne, et Bono le chanteur de U2 qui prend la notre, mais dépense son cachet d’Apple dans la région niçoise.
Pendant ce temps-là au moins on ne parle pas de la fashion-week, ni du dernier Tokio Hotel, dont à l’instar de milliers de jouvencelles, on se branle fortement. Mais l’on écoute Ben Affleck monter au créneau pour défendre l’Islam devant des millions d’américains médusés qui préfèrent encore partager un bus avec des Noirs plutôt que d’entendre ce genre de discours hérétique ! A l’heure où sort le dernier Fincher sur les écrans, dans lequel on aperçoit Ben à poil, force est de constater qu’il a de grosses couilles ! Chez nous, le seul acteur français de cette envergure s’appelle Gérard Depardieu et déballe tout, couilles et autres, dans un livre à son image : généreux, libre, franc et paillard. Tout ce que la France n’est plus.